Sociologie des organisations
Le Territoire : un concept aux multiples dimensions
INTRODUCTION
Le territoire est un ESPACE :
ESPACE fortement investi de sens
· investi géographiquement : il est appréhendé comme espace borné, délimité il « fait frontière » et dessine l’intérieur / l’extérieur. Il peut être défini au-delà d’une ligne plus ou moins marquée.
· investi culturellement : en raison :
- des mondes perceptifs inhérents à chaque culture (la voix, les pieds, les mains, les yeux, le corps sont utilisés de différentes façons pour traduisant des modes de vie, des modes d’entrée en relation…).
- de la rencontre des cultures différentes qui tentent de s’inscrire dans un « vivre ensemble »
· investi socialement : il inscrit la relation entre l’individu et la société puisqu’il est le lieu d’une identification dans la mesure où s’organisent en son sein de multiples attaches.
· investi par le discours : c’est alors le « parlé » qui incarne le territoire. Le territoire devient celui des idées au sein desquelles s’articulent la pensée et tout particulièrement les représentations sociales.
Le territoire par toutes ces dimensions :
Il est donc à plusieurs titres enjeu de lutte puisqu’il est l’espace par excellence du déploiement des politiques.
I. Le territoire comme espace géographique
- Les premiers travaux en sociologie urbaine
La méthode d’investigation privilégiée : l’observation et tout particulièrement l’observation participante. Cette méthode a été utilisée dans la ville de Chicago dans les années 20. Des jeunes de quartiers à l’intérieur desquels s’organisent des comportements délinquants, voire criminels, sont mis en situation de récolter des infos pour favoriser une visibilité de la situation.
Développement d’une réflexion sur la ville de Chicago comme territoire géographique qui consiste à apporter un éclairage sur ce qui s’y passe.
- repérage des différentes zones de concentration et de leurs spécificités :
· centre
· zone de transit
· zone d’installation
L’espace géographique dessine donc des territoires culturellement délimités, qui laissent place à des interstices (zone frontière) qu’il nous faut traverser. Lorsque nous les traversons nous passons d’un monde à un autre avec chaque fois cette possibilité qu’il se passe quelque chose dans l’entre-deux.
Difficile de parler de la géographie sans parler de culture ou de social….puisque les territoires sont occupés par des hommes qui se répartissent consciemment le territoire.
D’ailleurs à ce titre, nous pouvons faire référence aux dispositifs « politique de la ville » qui vient quadriller le territoire en fonction de variables socio-culturelles qui définissent le territoire.
Les territoires fon l’objet d’investigation sont « nommées » : zone sensible, zone franche…en fonction de leurs attributs… certains moyens seront alors déployés pour lutter contre ce que nous pourrions appeler d’un point de vue sociologique le « désordre social ».
Intervention de l’état et des collectivités territoriales en accord avec la « politique de cohésion sociale » dont un des objectifs principaux consiste à faire régner « la paix sociale » et à permettre que se développe ou se maintienne le sentiment de sécurité pour la collectivité.
Le territoire devient alors le lieu de ce qui nous protège.
- souvent considéré de par ses caractéristiques géographiques comme un espace borné :
· Territoire du quartier : là où on se sent plus fort
· Territoire du logement « le chez soi », là où on se sent protégé du regard des autres, là où se vit ce qui est de l’ordre de l’intime…
- Il pose conjointement la question des limites et de celle de la défense d’un lieu…pouvant traduire des comportements d’agressivité.
Le territoire est un milieu naturel au sein duquel l’individu s’adapte et qu’il modifie
· il y a les possibilités d’y entrer et d’en sortir
· les possibilités d’y circuler
· les possibilités d’y inscrire des pratiques localisées
· les possibilités d’y voir se fabriquer des liens sociaux dans certains espaces.
Il s’agit de mécanismes d’appropriation de l’espace qui sont autant de critères de lisibilité de l’espace produisant des effets.
- il y a des usages de l’espace
- il y a des habitus sociaux
- on y retrouve des lieux de transit,
- on y retrouve des lieux où on s’installe ….qui donne une certaine valeur aux lieux, à certaines places, à certaines cages d’escalier, …qui sont alors très fortement investis de sens.
Il s’agit de contexte où se fabrique l’expérience collective donnant le sentiment d’appartenance : j’appartiens à cet espace… favorisant le développement de conduites collectives ou singulières par le jeu des acteurs. Ces conduites sont relayées par le discours qui circulent dans l’espace et favorise la création de stigmate : pratiques différentes de celles à laquelle on pourrait s’attendre, dessinant de part et d’autre de fortes contraintes.
- pour ceux qui investissent le lieu en question
- pour ceux qui sont en dehors du lieux…………..chacun en parle à sa manière.
Travailler donc autour de la négation de l’autre sur le territoire dans lequel il est en « je ». L’autre n’est pas un ennemi potentiel, il me faut penser avec l’autre…sans perdre le sens.
II. Le territoire comme espace culturel
Il est le point d’accroche des entités culturelles parce que l’un se fabrique au contact de l’autre sans que l’on sache vraiment qui agit sur qui ? ….pour aller vers la fabrication de mondes particuliers.
Ces mondes sont le produit de cultures spécifiques qui se rencontrent ou se heurtent.
Ainsi, bien au-delà d’une logique du « chez soi », se tisse des logiques relationnelles marquées de signes :
- visuels
- vocaux
- olfactifs
ces rencontres font l’objet de tensions, elles sont parfois subies, parfois voulues dans des lieux où s’organise la vie sociale. Lieu où les institutions, les valeurs de la nation viennent signifier à chacun qu’il est le même.
Comme s’il s’agissait de faire avec une « transculturalité ». L’ensemble de ces éléments qui sont susceptibles de pouvoir traverser l’ensemble des identités culturelles. Les valeurs auxquelles nous nous référons sont souvent celles de la citoyenneté.
Venir dire à chacun qu’il est citoyen.
Question : dans quelle mesure l’ES n’est-il pas porteur de cette culture tranverse, lorsqu’il tente de travailler avec les personnes sur le territoire et qu’il énonce un certain nombre de principes comme le respect et la tolérance…..afin qu’il y ait partage sur la base d’un respect mutuel.
Le dialogue des cultures donne alors lieu à la construction d’une articulation positive des différences et des ressemblances entre partenaires de l’échange.
L’interculturalité implique la rencontre et le partage. Toutefois, cela fait craindre à certains de perdre ce qu’ils croient être le caractère original de leur culture, part d’originalité qu’ils surestiment.
Or, toutes les cultures se construisent sur l’emprunt à d’autres cultures. LE travail social contribue d’ailleurs à cette rencontre entre les cultures. LE TS continue à lutter pour que se tisse le lien social, proposant la construction d’échanges entre les « usagers », travaillant autour de ces valeurs qui impliquent la rencontre, le partage et la transformation des identités en présence.
Dans l’interculturation ; le sujet se structure dans une double référence symbolique hétérogène et irréductible à l’un des deux pôles culturels. (Par opposition à l’acculturation puisqu’il ne s’agit pas de combiner dans une logique de coexistence de deux cultures, il s’agit de créer un cadre commun où les différences sont intégrées et acceptées comme telles.
Ainsi, l’interculturalité implique une redéfinition de notre rapport à soi et aux autres.
- elle commence avec un effort de connaissance de soi et de sa propre culture
- elle demande à ce que chaque culture puisse faire un retour sur elle-même ; sur ce qu’il en est de ses rites, de ses tabous, et de ses mœurs.
- Elle nécessite un travail de mise à plat de ce qui fait sens pour aller vers une forme de reconnaissance possible, vers un partage alors envisageable.
Travailler à l’instauration d’une société de citoyens rassemblés par une commune capacité d’autonomie.
Retour sur l’acculturation :
L’acculturation est alors définie comme un ensemble de phénomènes qui résultent de contacts durables et directs entre des groupes de cultures différentes entraînant des changements dans les valeurs et les normes initiales.
Ainsi, selon Herskovits, l’acculturation implique 3 séries de conséquences :
- l’adoption : un des 2 groupes admet la culture de l’autre, il y a assimilation, mais celle-ci doit être volontaire (sinon, la culture dominée continue d’imprégner les comportements).
- La combinaison : des 2 cultures en contact va naître une nouvelle culture. Elle peut être une véritable synthèse ou s’avérer une configuration éclectique adaptable selon les comportements et les situations.
- La réaction : à cause de l’oppression et des conséquences imprévues de l’adoption de traits étrangers, des mouvements de contre-acculturation vont naître, c’est-à-dire un refus actif de la culture dominante par l’inculcation de comportements et des valeurs qu’elle ne peut tolérer.
Cette mise en scène est à la fois :
- productrice d’ajustements permanents entre des groupes de population qui partagent un même territoire
- et l’affirmation d’une identité propre qui au nom de la différence permet la cohabitation et la non remise en cause des caractères individuels.
La question de l’intégration :
Les populations les plus défavorisées, qu’elles soient issues de l’immigration ou pas, peuvent être confrontées à de forts décalages entre les attentes liées au modèle culturel national et l’échec des tentatives d’insertion dans le monde du travail et la vie citadine.
La question de l’acculturation nous ramène à celle de l’intégration :
Elle impose dès lors de différencier au sein de communautés ethniques apparemment homogènes, des trajectoires d’insertion et des trajectoires d’exclusion.
Pour ces populations immigrées la problématique même de l’intégration devient un obstacle dés lors qu’on en fait une fin en soi. GRIBAUDI montre que la vie turinoise de certains immigrés piémontais ne prenait sens que par rapport à des enjeux matériels et symboliques essentiellement définis ailleurs et autrement, dans le village d’origine où parfois ils vont d’ailleurs finir leur vie. Il s’agit d’imposer à ce type de migrants une norme de vie qui a aucun moment en fût la leur.
III. Le territoire comme espace social
Nous sommes en présence sur le territoire d’intervention de codes sociaux spécifiques, des repères culturels appris qui informent sur les uns et sur les autres. Ainsi, au sein de chaque quartier, le quadrillage des espaces définit des enjeux :
- distend les rapports sociaux au quotidien en :
· démoralisant leurs habitants
· en stimulant le dénigrement mutuel….pouvant laisser place à la désorganisation des conduites.
Ce qui n’exclut pas un attachement au quartier qui apparaît finalement aux jeunes comme à leurs familles, comme le seul espace réellement possédé et maîtrisé, celui qui préserve de l’humiliation et de la honte.
C’est ainsi que le stigmate collectif se retourne en fierté d’appartenir à un monde de durs, colportés par des récits de bagarres et d’arrestation, et surtout d’honneur.
Le territoire c’est aussi celui des idées : il cristallise des idéologies et fabriquent un ensemble de représentations qui permet à une communauté d’individus de se trouver une identité commune dans un lieu.
Territoire se définit alors par un discours qui relève d’un certain positionnement au regard de pratiques inscrites dans un contexte spécifique donné.
Noyau______ éléments périphériques
Elles répondent à 4 fonctions essentielles :
- les fonctions de savoirs : elles permettent de comprendre et d’expliquer la réalité
- les fonctions identitaires : elles définissent l’identité et permettent la sauvegarde de la spécificité des groupes
- les fonctions d’orientation : elles guident les comportements et les pratiques. Elle est une action sur la réalité, elle font que s’opèrent des sélections et des filtrages de l’information, des interprétations visant à rendre la réalité conforme aux représentations que l’individu s’en fait.
- Les fonctions justificatrices : elles permettent à posteriori de justifier les prises de positions et les comportements.
- Fonction de défense : elle permet de supporter les contradictions qui sont alors réinterprétées dans le sens de la configuration centrale. L’individu ou le groupe propose une rationalisation.
Dans ce cadre, la représentation sociale se définit comme un véritable guide pour l’action.
Celle-ci étant alors décrite comme une négation de l’autre dans son rapport à ses territoires.
On constate d’ailleurs des formes de violence associées à la construction ou à la défense de territoires propres.
Resterions-nous prisonniers de cadres mentaux qui rendent impossible de considérer l’autre autrement que comme un ennemi potentiel ?
Ces logiques de pensées nous amène vers la question de la ségrégation.
Qu’est-ce que la ségrégation ?
Acte de séparer, de mettre à l’écart. Attention à la manière que l’on a d’entendre cette définition (empreint d’un discours idéologique : Eviter les interférences !).
Travailler sur la ségrégation urbaine consiste à repérer les différences de localisation entre des groupes définis par la position sociale ou l’origine ethnique.
Le terme de « ségrégation » est à dissocier de la figure du « ghetto » qui est avant tout une forme de regroupement spatial.
Qu’est ce qu’un ghetto ?
Toute forme de regroupement spatial associant étroitement des populations défavorisées à des territoires circonscrits. Cette image du ghetto peut faire obstacle à la compréhension des phénomènes urbains.
Le ghetto décrit avant tout un espace urbain au sein duquel se juxtaposent des situations de précarité ou des trajectoires d’échec, et des situations plus confortables.
Le ghetto se caractérise donc par une forte hétérogénéité des origines sociales, des positions sociales, cependant il recouvre une homogénéité de culture (ghetto chinois…).
Dans le langage des sciences humaines on parle aujourd’hui plus largement de quartiers d’exil.
Qu’est-ce qu’un quartier d’exil ?
Aujourd'hui 6 visiteurs - 8 pages vues Total 80405 visiteurs - 128343 pages vues Contenu
Nombre de pages : 11